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Infusion ou café frappé ?
27 avril 2013

NOLA, la musique qui colle au coeur

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Accro, complètement droguée. En manque, même ! Je viens de terminer le dernier épisode de la troisième (et hélas avant-dernière) saison de la série de HBO, Treme (je le prononçais à tort "Treeme" mais en fait, on dit "Tremé"), créée par les célèbres David Simon et Eric Overmeyer de The wire. Depuis que je me suis plongée dedans, cette série m'obsède bien au-delà de mes séances de visionnage, tant elle a su me prendre aux tripes et au coeur.

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La Nouvelle Orléans après Katrina

De quoi s'agit-il ? L'héroïne de cette histoire, c'est NOLA, the "Big easy", la Nouvelle Orléans meurtrie de l'après ouragan Katrina. La caméra d'Agnieszka Holland (réalisatrice de l'excellent Europa Europa, et pour The wire, à la TV - excusez du peu) suit le parcours croisé d'habitants quelques mois après l'ouragan, et notamment dans le quartier populaire emblématique du Tremé ("[...] l'un des plus vieux quartiers de la Nouvelle Orléans et historiquement, à l'époque de l'esclavage, le quartier des noirs non-esclaves. C'est un lieu symbolique de la culture afro-américaine et créole." Source : Wikipédia.)

Certains ont pu rester, ont été relogés et tentent de maintenir leur activité. D'autres ont presque tout perdu et veulent juste "rentrer à la maison". Sonnés, déprimés, ils tentent de reprendre leurs marques dans une ville qu'ils ont du mal à reconnaître et dont le sort dépend de politiques pas très reluisantes.

La série ne mâche pas ses mots (et notamment par le verbe haut et plein d'humour de deux personnages, Creighton - John Boorman - Bernette et DJ Davis - Steve Zahn - McAlary) : la reconstruction de la Nouvelle Orléans, c'est l'occasion de "faire le ménage" et d'empêcher certaines classes populaires noires de rentrer au bercail. Pour DJ Davis, Katrina n'est pas "the storm" (l'ouragan), mais le beau gâchis du "federal flood" (l'inondation fédérale). La police locale (le NOPD) est sérieusement égratignée au passage : bavures, passages à tabac, meurtres... La série démonte la mécanique d'un certain type de comportement de la part des autorités dans le cahos de l'après Katrina (sur ce point, on peut s'intéresser à l'affaire du Dantziger Bridge).

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La chef de cuisine Janette Desautel, le tromboniste Antoine Batiste, DJ Davis McAlary, personnages de la série.

Les points d'ancrage de ces communautés qui font front avec fierté et courage ? La musique et la gastronomie, bien sûr !

Et là, c'est toute la générosité de cette ville et de sa culture qui réchauffe le coeur et permet d'entrevoir un avenir plus optimiste pour ses habitants. La gastronomie, c'est un mélange de friture, de riz et de haricots rouges, de fruits de mer frais : une tradition revisitée et magnifiée par le personnage du chef Janette Desautel, talentueuse "chef de cuisine" qui essaie de tenir la barre de son restaurant dans une ville qui reprend lentement son souffle.

La musique, c'est celle du jazz des origines, le Dixieland et les points de tension avec les modernes : après tout, la Nouvelle Orléans n'est-elle devenue qu'une salle de concert pour touristes éméchés sur Bourbon Street ? Mais attention à qui critique le patrimoine musical de NOLA : seuls ses habitants ont le droit de se poser la question, et défendront corps et âme leur ville face à la moindre critique extérieure. On croise toutes sortes de styles dans Treme : il y en a pour tout les goûts. La série est truffée de thèmes jazz traditionnel et moderne (qui se mêlent d'ailleurs avec bonheur), soul, funk, cajun, "bouncy music", rap et même métal ! Autant de morceaux lancinants qui vous reviennent sur le bout de la langue longtemps après : de l'énergie pure, portée par des musiciens souvent issus du cru, généreux, respectueux de leur pairs, humbles et facétieux à la fois.

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Le Big Chief Albert Lambreaux, des "Guardians of the flame" (interprété par Clarke Peters).

La tradition musicale, c'est aussi les scènes de liesse de Mardi Gras, une véritable institution de la Nouvelle Orléans, où chacun déambule vêtu de son plus beau déguisement, ouvert (offert ?) à tous les plaisirs de la ville. C'est lors de cette fête que sortent les Big Chiefs indiens et leur cortèges, dans leurs riches parures brodées à la main, pour parader et faire vivre la tradition du carnaval afro-américain.

Celui-ci prend sa source au XIXè siècle, quand les communautés amérindiennes et afro-américaines se rapprochent pour lutter et résister à la ségrégation ambiante. Les Indiens, ce sont ceux qui ne plient pas sous la menace, ceux qui ne se laissent pas acheter par les discours politiciens.

C'est l'âme de Treme : des personnages qui ont la rage de vivre, de continuer et de se fabriquer de beaux lendemains dans une ville qu'ils aiment par dessus tout.

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Pour le plaisir, quelques extraits qui mettent dans l'ambiance et témoignent de la richesse musicale de la série :

Le générique

 "My Indian Red"

"Can I change my mind"

"Hu Ta Ney" (ou quand le jazz moderne rencontre la tradition indienne)

Et un petit documentaire de HBO "Treme: Season 2 - Food For Thought"

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